| | Edito L'agriculture « éconumérique » : l'agriculture du Futur !
En cette première semaine de Mars, aurait dû se tenir à Paris, comme chaque année, le Salon de l'Agriculture. Mais en raison de la grave pandémie qui actuellement frappe la France et l'ensemble de l'Humanité, ce salon a été supprimé. Aussi dans cette semaine qui, chaque année, rappelle l'importance de l'Agriculture pour notre Pays, je dédie mon édito à tous les jeunes agriculteurs mais aussi à tous les jeunes, garçons et filles, qui hésitent encore à choisir ce beau métier, chargé d'Avenir. Selon les dernières prévisions de l’ONU, la population mondiale devrait augmenter de deux milliards d’individus d’ici 2050, pour atteindre 9,7 milliards d’êtres humains à cette échéance. Pour nourrir correctement cette population, la FAO (L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) considère qu’il est nécessaire d’accroître d’au moins 70 % la production agricole mondiale par rapport à son niveau actuel (4 milliards de tonnes), tout en réduisant de moitié le niveau effarant de produits alimentaires perdus ou gaspillés chaque année (1,3 milliard de tonnes par an), faute de solvabilité des consommateurs, mais aussi, on l’ignore souvent, de moyens de conservation et de transports suffisants pour acheminer ces denrées jusqu’aux consommateurs finaux. Dans un tel contexte, on comprend mieux pourquoi l’ONU a placé l’agriculture et l’alimentation en seconde position de ses 17 objectifs de développement durable et a identifié les trois grands défis que l’agriculture mondiale doit absolument relever : maintenir un niveau de production suffisant pour faire face à l’accroissement de la demande, assurer un revenu décent aux paysans et enfin réduire sensiblement l’empreinte climatique et environnementale de l’agriculture. En 2019, une étude sino-australienne publiée dans Nature (Voir Nature) a identifié les leviers à actionner simultanément pour parvenir à nourrir la planète correctement, et de manière durable, d’ici 30 ans. Le premier levier concerne la diminution de la place accordée aux produits d’origine animale dans nos assiettes. Au cours des 60 dernières années, la consommation moyenne de viande par habitant dans le monde a doublé, passant de 23 kg à 45 kg. Selon ces chercheurs, une telle évolution n’est pas tenable sur le long terme, car il n’y aura pas assez de terre, d’eau et de nourriture disponibles pour doubler à nouveau cette production mondiale de viande. Il est donc impératif de diminuer la consommation globale de protéines animales, au profit des protéines d’origine végétales et marines. Il est également nécessaire de diminuer le gaspillage alimentaire en améliorant les infrastructures de stockage, la chaîne logistique et les techniques de conservation des aliments. Le deuxième levier concerne une profonde réorientation de l’élevage. Il faut 15 000 litres d’eau et 16 kilos de protéines végétales pour obtenir 1 kilo de protéines de bœuf, alors que 7 kilos de protéines végétales suffisent pour obtenir 1 kilo de protéines de porc, ou de poulet, et que 3 kg de protéines végétales peuvent produire un kg de poisson. Actuellement, plus de 80 % des céréales cultivées servent à l’alimentation animale. Pourtant, sur une même surface, on peut produire quatre fois plus de protéines végétales qu’animales. En Europe, 70 % des terres agricoles sont déjà dévolues à l’élevage et celui-ci consomme à présent autant de terres et de forêts que l’urbanisation… Face à cette évolution intenable dans la durée, cette étude préconise de plafonner la part de produits d’origine animale dans le régime alimentaire à 40 % des calories quotidienne et favoriser la production de lait, de poulet et de poisson, en substitution au porc et au bœuf dont l’impact environnemental est bien plus élevé. Enfin, le dernier levier pointé par l’étude passe par l’amélioration des rendements agricoles, tout en diminuant sensiblement le recours aux pesticides, les émissions de CO2 et la consommation d’eau agricoles, à l’aide de nouvelles techniques agronomiques et numériques respectueuses de l’environnement. Ce travail converge avec les résultats de la vaste et remarquable étude publiée en novembre 2017 et réalisée par l’Institut suisse de recherche sur l’agriculture biologique. Ce travail d’une ampleur sans précédent avait en effet montré qu’il était envisageable de nourrir l’Humanité en 2050, sans hausse de la superficie de terres agricoles, avec des émissions de gaz à effet de serre réduites, grâce à une agriculture 100 % biologique, mais à deux conditions impératives : diviser par trois le gaspillage alimentaire et la part de protéines animales dans l’alimentation humaine (Voir Nature Communications). Il est intéressant de souligner qu’une autre étude concernant la France, réalisée en 2016 par l’association Solagro, arrivait à une conclusion assez similaire pour notre pays. Ces recherches montraient qu’une agriculture à 50 % biologique pourrait nourrir 72 millions de Français en 2050 sans augmenter la quantité de terres arables, tout en divisant par deux les émissions de gaz à effet de serre, la consommation d’énergie et celle d’eau et par trois la consommation de pesticides. Mais là encore, cette transition ne pourrait se faire qu’en supposant un changement profond de nos habitudes alimentaires, à commencer par une inversion de la proportion entre protéines animales (qui représentaient actuellement les deux tiers de notre apport protéique) et végétales dans notre alimentation (Voir Solagro). Mais la mutation agricole mondiale ne sera pas seulement qualitative, elle sera aussi spatiale. Dans un monde où plus de 80 % des habitants résideront en milieu urbain dans 30 ans, le concept de ferme urbaine verticale ne cesse de se développer. L'agriculture verticale, grâce à une maîtrise parfaite de l’ensemble des paramètres (chaleur, luminosité, humidité, nourriture) superpose des cultures en hauteur, sur plusieurs étages, et permet ainsi un gain d'espace considérable et une production accrue. Depuis 10 ans, les fermes urbaines, verticales ou non, se multiplient partout dans le monde et en France. À Épaux-Bézu, près de Château-Thierry, dans l’Aisne, Gilles Dreyfus et Nicolas Seguy ont installé une ferme urbaine de plus de 3 000 m² au sol, à l'intérieur de laquelle les cultures sont réalisées en environnement contr&ocir c;lé. Il s’agit de l’une des plus grandes fermes verticales d'Europe et elle devrait livrer cette année 100 tonnes de plantes dans toute la France, à l'horizon 2021. Ces végétaux sont cultivés en hydroponie, c’est-à-dire hors-sol, à l'aide d'un substrat irrigué au goutte à goutte, composé d'eau et de nutriments. En France, la société Urban Ferm, implantée à Saint-Malo depuis 2016, propose des containers de « production agricole urbaine ». Il s’agit de modules tout équipées de 13 m², qui fonctionnent également en ferme hydroponique. Pour fonctionner, la Farm box n’a besoin que d’une prise de courant et d’un raccordement à l’eau. La production agricole est entièrement informatisée et paramétrable en temps direct. Dans sa dernière configuration, la Farm Box permettra de produire 5000 salades par mois sur 26 m2, rendement cent fois supérieur au mètre carré à celui de l’agriculture conventionnelle. Autre avantage, les lieux de production sont proches des consommateurs, ce qui diminue d’autant les impacts sur l’environnement. Depuis plus d’un an, une partie des plantes aromatiques vendues chez L eclerc Saint-Grégoire provient d’une Farm Box installée à proximité sur un parking. Reste que ces fermes hydroponiques, si elles vont permettre de réintroduire des productions agricoles de proximité au cœur de nos villes, ne suffiront pas, loin s’en faut, à nourrir la planète et que seule l’agriculture de précision, que je préfère appeler « éconumérique », combinant à la fois les avancées de l’agronomie, la production d’énergie propre et les outils de prévisions et de gestion numériques, me semble en mesure de relever cet immense défi d’une alimentation suffisante, variée, saine et durable pour tous. En France, cette révolution est déjà en marche et l’on estime que 40 % de nos 450 000 exploitations utilisent déjà des outils numériques pour améliorer à la fois leur productivité et leur rentabilité, tout en diminuant a u maximum l’utilisation de produits phytosanitaires. L’un des fleurons de cette nouvelle agriculture 4.0 est la jeune société Sencrop, créée en 2016 à Lille par Martin Ducroquet, fils d'agriculteurs et diplômé de l'ESCP Europe, et Michael Bruniaux, docteur en électronique et informatique. Cette entreprise propose aux agriculteurs les services d’une plate-forme de données agro-météo, en lien avec des capteurs connectés. Les données remontent en temps réel tous les quarts d'heure et permettent d’alimenter des outils de conseils agronomiques ou de gestion de risques sur les cultures. Grâce à cet outil, l’exploitant peut se connecter à tout moment sur son application mobile, via un Pc, une tablette ou un smartphone, pour surveiller ses parcelles et examiner les variations du climat : mesure de la pluviométrie, de l'hygrométrie, de la température, de la vitesse du vent, etc... Cette technologie permet de détecter en temps réel et d’anticiper l'arrivée potentielle de ravageurs ou de maladies. En se connectant à la plate-forme de données de Sencrop, l'exploitant a accès à un outil d'aide à la décision (OAD) alimenté par ses données et celles de logiciels tiers. Il peut alors choisir rapidement la stratégie d’action qui présente, pour sa situation particulière, le meilleur rapport coût-efficacité. La start-up Ombrea fabrique, quant à elle, des ombrières intelligentes qui offrent aux plantes les meilleures conditions pour grandir. Toutes les dix minutes, des capteurs situés entre 2 mètres de hauteur et 30 centimètres sous le sol effectuent des relevés sur des paramètres comme la luminosité ou le taux d’humidité. Les ombrières modulent l’ombrage en fonction des données récoltées. Cette solution d’optimisation peut être appliquée aux vignes, mais également aux cultures de plein champ. Elle serait en mesure, selon certaines expérimentations, d’améliorer les rendements de plus de 50 %, sur la tomate et la fraise, tout en diminuant d’un tiers les besoins en eau. Mais une autre solution prometteuse, dont je vous ai déjà parlé dans RT Flash, peut également permettre d’optimiser de nombreuses productions agricoles, l’agrivoltaïsme de nouvelle génération. Ce concept d’avenir utilise des panneaux solaires bifaciaux suspendus, laissant passer la lumière sur les deux faces. Ces panneaux sont pilotés par ordinateur et ne gênent pas le passage des engins agricoles. Ils permettent de produire, en moyenne annuelle, environ 345 000 kWh par hectare, de quoi alimenter en électricité une centaine de foyers (hors chauffage). En encourageant davantage cet agrivoltaïsme de nouvelle génération, comme le fait l’Allemagne, nous pourrions aller bien au-delà des objectifs prévus pour 2030 (18TWh de production électrique photovoltaïque par an, contre 4,5 aujourd’hui) et produire 29 TWH par an à l& #8217;horizon 2030 (ce qui correspondrait à 6 % de notre consommation électrique nationale), en nous fixant comme nouvel objectif d’atteindre un 1000ème de la surface agricole utile nationale, soit 290 km2, principalement dans le sud de la France, équipé en agrivoltaïque. Dilepix propose pour sa part des solutions logicielles permettant de détecter, de localiser et d'interpréter des menaces ou des opportunités agronomiques, grâce à une analyse fine des images et de vidéos. L’outil proposé contrôle en temps réel et automatiquement les images de capteurs et de caméras installées sur les engins agricoles. En combinant des réseaux de neurones avec des algorithmes de vision par ordinateur, ce système est capable de détecter automatiquement des situations anormales dans les images d'une caméra. Cet outil peut aussi être embarqué sur des drones dédiés. En matière de robotique agricole, la nouvelle génération de machines qui arrive sur le marché va également profondément transformer le métier d’agriculteur, en le recentrant sur les tâches de coordination, de prévision et de stratégies productives. Le semencier Deleplanque vient par exemple de présenter son prototype d’un nouveau robot de désherbage mécanique, baptisé BlueBob, qui sera commercialisé en 2023. L’appareil désherbe mécaniquement entre les rangs à une vitesse de 0,5 ha/h. Il évolue de manière autonome, guidé par GPS, à une vitesse maximale de 4 km/h, grâce à des moteurs électriques et une batterie fournissant actuellement une autonomie de 8h. Autre exemple, le robot Ted qui sera commercialisé d’ici la fin de l’année. A compter de la mi-octobre, le robot va entamer une campagne de démonstrations dans plusieurs vignobles. Ted est un robot enjambeur électrique capable de travailler des demi-rangs de vigne. Ses arceaux modulaires lui permettent de s’adapter à différentes configurations de vignoble (vigne étroites, vignes hautes...). On peut également citer le robot de désherbage Dino de la société Naïo technologies, qui a été récompensé au salon Agritechnicat, qui s’est tenu récemment à Hanovre. Ce robot autonome et électrique a été spécialement conçu pour le désherbage mécanique des cultures maraîchères en planches (salades, carottes, oignons). Ce robot très performant permet de supprimer l’usage d’herbicides chimiques, et de réduire la main-d’œuvre affectée au binage. Jusqu’à présent, Dino ne savait que détruire les plantes indésirables. Désormais, il est également capable, grâce à un puissant algorithme d’IA, de reconnaître toutes les espèces de légumes et de nettoyer l’espace libre entre deux plantes. Ces robots agricoles ont vocation à s’insérer dans un système modulable de production agricole informatisée dont le cœur sera constitué par la nouvelle génération de tracteurs polyvalents et autonomes, qui vient de faire son apparition sur le marché. Parmi ces machines, on peut citer le Monarch, un tracteur électrique de 40 CV, d’une autonomie de dix heures, qui peut travailler avec ou sans chauffeur. Cet engin polyvalent et modulaire peut intervenir en viticulture, arboriculture et en maraîchage. Doté de lidars et de caméras à 360 degrés, il peut travailler de jour comme de nuit en toute sécurité et n’oublie pas de collecter et d’analyser 240 GO de données sur les cultures chaque jour. Quant à l’exploitant, il reçoit régulièrement, sur son smartphone et son Pc, des rapports d’activités et des messages en cas d’anomalies. Le potentiel de ce marché très prometteur des outils robotiques et numériques agricoles n’a pas échappé à la Chine, et le fabricant chinois de drone DJI a dévoilé en novembre dernier son nouvel appareil dédié au monde agricole. Le drone Agras T20, qui se plie et se déplie en quelques secondes, peut être programmé en avance afin de fonctionner de façon autonome sur une tâche donnée. Grâce à son radar numérique omnidirectionnel, il peut reproduire la scène à 360° et en 3D, ce qui lui permet de détecter les obstacles dans toutes les directions et les contourner automatiquement. Résistant à la poussière et à l'eau, le drone peut voler dans la plupart des environnements même de nuit. En France, le drone Abelio, avec ses 2 kilos pour plus de deux mètres d’envergure, peut survoler des champs pendant trois à douze heures. Grâce à son capteur, un logiciel établit en quelques minutes un diagnostic des parcelles surveillées, en prenant en compte les conditions météorologiques, ainsi que les données satellitaires et agronomiques, afin de détecter des maladies, la présence de mauvaises herbes ou encore un manque d’eau. En plus de limiter l’utilisation de pesticides, le drone Abelio permet une économie substantielle d’utilisation de produits phytosanitaires. En octobre dernier, le laboratoire X d'Alphabet (maison-mère de Google) pour les technologies émergentes, "moonshot factory", a dévoilé une autre initiative, le projet Mineral, qui vise à améliorer la productivité de l'agriculture face à une demande croissante. Equipée d'un buggy monté sur roues et équipé de caméras, de multiples capteurs et d'IA, l'équipe parcourt les champs pour fournir aux cultivateurs des informations de haute qualité et basées sur des données concernant leurs cultures. Les agriculteurs peuvent alors prendre des décisions basées sur une meilleure compréhension du comportement de leurs plantes et de leurs cycles de production. La généralisation de tels portails numériques d’observation et de diagnostic agricole pourrait également contribuer de manière puissante à acc&eacu te;lérer la transition vers une agriculture de précision dans notre pays. Même si les outils robotiques et numériques tiendront une place importante dans l’agriculture de demain, ils devront s’appuyer sur les avancées en matière d’agronomie qui, seules, permettront d’améliorer la productivité agricole, dans un contexte de raréfaction des surfaces agricoles disponibles, tout en respectant l’environnement et en limitant drastiquement l’utilisation de pesticides. Une étude réalisée par des chercheurs de l’Institut Adolphe Merkle et du département de biologie de l’Université de Fribourg a récemment montré que les nanoparticules de silice amorphe, naturellement présentes dans des cultures alimentaires, comme les céréales, pouvaient stimuler la réponse immunitaire des plantes aux attaques des agents pathogènes (Voir Nature Nanotechnology). Ces scientifiques ont réussi à synthétiser des nanoparticules de silice ayant des propriétés similaires à celles des plantes, et ont montré l’efficacité anti-bactérienne de ces nanoparticules sur plusieurs espèces de salades. Ces chercheurs précisent que ces nanoparticules se dégradent sans laisser de trace en présence d’eau et pourraient constituer une alternative peu coûteuse, très efficace, sûre et durable pour la protection des plantes contre les maladies. Aux Etats-Unis des chercheurs du MIT sont allés encore plus loin : ils ont réussi à intégrer des nanotubes de carbone dans des feuilles d’épinards. Ces nanoparticules de dimension inférieure à 10 nm émettent un signal fluorescent en présence de certains polluants, comme l'oxyde nitrique. Ce signal est détectable par des caméras infrarouges, et il déclenche l'envoi d'un e-mail d'alerte aux chercheurs. Le but, à terme, est d'utiliser ces plantes pour alerter sur la pollution des eaux souterraines, mais aussi pour prévenir d'une sécheresse et donc des changements climatiques (Voir Futurism). Ces recherches ouvrent la voie, à terme, vers de véritables interfaces de communication homme/plantes. Mais pourquoi, me dira-t-on, vouloir favoriser une telle mutation scientifique et technologique de notre agriculture, alors que notre pays est réputé pour sa puissance agricole, qui s’appuie sur des productions très diverses et de grande qualité ? Tout simplement parce que notre agriculture est en réalité bien plus fragile et menacée que l’on ne l’imagine. Un rapport instructif du Sénat sur l’avenir de l’agriculture en France, publié en mai 2019, sous l’égide du Sénateur Laurent Duplomb (Voir Sénat) dresse un tableau sans concession de notre agriculture et de son avenir. Selon ce travail, l’excédent agricole français tend à disparaître et a été divisé par deux entre 2011 et 2017 en euros courants. Résultat&nb sp;: notre pays est passé en 15 ans de la 3ème à la 6ème place des états les plus exportateurs de produits agricoles. À ce rythme de décroissance, la France pourrait même connaître son premier déficit agricole en 2023, selon ce rapport éclairant. Les raisons de cette dégradation sont multiples. D’abord, l’agriculture française doit faire face à la diminution continue de sa surface agricole utile, qui s’est réduite de 17 % au cours des 60 dernières années, soit une perte de près de 60 000 km². Résultat de cette évolution alarmante, la production agricole globale de notre pays stagne depuis une vingtaine d’années. Autre évolution sur le temps long, l’agriculture française a perdu les deux tiers de ses actifs depuis 50 ans et cette hémorragie humaine se poursuit, bien qu’au rythme plus lent de 1 % par an depuis 5 ans. Enfin, la France doit subir une concurrence de plus en plus féroce, à la fois des autres p ays européens et des nouvelles puissances agricoles émergentes, qui ne respectent pas les mêmes contraintes sanitaires et environnementales. Face à cette réalité implacable, à ce nouveau contexte économique mondial, aux impératifs climatiques, mais aussi aux nouvelles exigences des consommateurs, qui veulent avoir accès à des produits plus sains, notre agriculture, si elle veut survivre, n’a donc pas le choix : elle doit entamer sa révolution "éconumérique", qui lui permettra à la fois d’améliorer ses rendements, sa productivité et sa compétitivité internationale, et de mieux diversifier ses productions tout en respectant l’environnement, en s’élargissant vers la production délocalisée d’énergies propres (solaire, biométhane) et en offrant à nos agriculteurs de meilleures conditions de vie, des revenus décents et un métier tourné vers l’avenir, et profondément revalorisé. René TRÉGOUËT Sénateur honoraire Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat e-mail : [email protected] | |
| | Information et Communication | |
| | | Facebook AI, la division de recherche en intelligence artificielle de Facebook, et l'Ecole de médecine de l'Université de New-York (NYU), ont développé trois systèmes d'apprentissage automatique capables de prédire jusqu'à 4 jours à l'avance si l'état d'un patient atteint du Covid-19 va se détériorer, à partir de ses radiographies du thorax. Les chercheurs viennent de publier leurs modèles sur GitHub. Ces algorithmes doivent permettre d'éviter de renvoyer trop tôt un patient à domicile alors que son état pourrait se détériorer par la suite et aux hôpitaux d'anticiper la demande en oxygène. Dans les détails, l’un prédit la détérioration du patient sur la base d’une seule radiographie pulmonaire, un autre fait de même avec une série de radiographies et un troisième utilise une seule radiographie pour prédire la quantité d’oxygène supplémentaire (le cas échéant) dont un patient pourrait avoir besoin. Les chercheurs ont préformé leurs modèles via deux data sets publics qui stockent des données de radiographie pulmonaire saine, MIMIC-CXR-JPG et CheXpert, en utilisant une technique d'apprentissage non supervisée. Appelée Momentum Contrast (MoCo), cette technique a permis aux modèles de tirer des conclusions des scanners sans que ces derniers n'aient besoin d'être préalablement étiquetés. Pour affiner leurs systèmes, les scientifiques ont ensuite utilisé un plus petit data set de l'Université de New York, qui contenait 26 838 radiographies du thorax de 4914 patients atteints du Covid-19. Chaque imagerie médicale a été étiquetée en fonction du temps que l'état du patient a mis à se détériorer (24, 48, 72 ou 96 heures) via deux classificateurs. Un classificateur prédit la détérioration du patient sur la base d'une seule radiographie tandis que le second utilise une série de radiographies. Au niveau des performances, les chercheurs affirment que leurs modèles ont surpassé les experts humains pour ce qui est de la prévision des besoins en soins intensifs, des prévisions de mortalité et des prévisions globales d'événements indésirables à plus long terme, jusqu'à 4 jours. Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash CNET | | ^ Haut | |
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| Nanotechnologies et Robotique | |
| | | Des chercheurs de l'Université australienne de Nouvelle-Galles du Sud de Sydney (UNSW) ont mis au point une encre pour imprimer en 3D des structures osseuses directement dans le membre abîmé. Cette nouvelle technique pourrait être particulièrement intéressante lorsqu'il y a une demande de réparation in situ de défauts osseux tels que « ceux causés par un traumatisme, un cancer, ou lorsqu'un gros morceau de tissu est réséqué », explique Iman Roohani, chercheur au sein de l'école de chimie de l'UNSW. Connue sous le nom de bio-impression céramique omnidirectionnelle en suspension cellulaire (COBICS), cette nouvelle technique permet d'imprimer des structures osseuses qui durcissent en quelques minutes, une fois placées sous l'eau. Même si ce n'est pas la première fois que des scientifiques fabriquent un matériau capable de reproduire des os, le COBICS permet de créer un matériau à température ambiante sans produits chimiques ou radiations agressives, affirment les chercheurs. L'encre, à l'origine de l'impression des tissus osseux, est composée de phosphate de calcium, un solide blanchâtre qui compose la partie minérale des os et des dents. Elle est fabriquée dans "une matrice de microgel" contenant des cellules pour former « une structure qui est chimiquement similaire aux blocs de construction osseuse » (une sorte d'échafaudage sur lequel les os se régénèrent, ndlr), détaillent les scientifiques. De plus, l'encre a été formulée de telle sorte que la "conversion" ne s'amorce que lorsqu'elle est exposée aux fluides corporels, « ce qui laisse un temps de travail suffisant à l'utilisateur final, par exemple un chirurgien », poursuivent-ils. Le chercheur Kristopher Kilian est persuadé que ce nouveau procédé pourrait ouvrir une toute nouvelle voie dans la réparation des tissus osseux. « Imaginez un jour où un patient ayant besoin d'une greffe osseuse arrive dans une clinique où la structure anatomique de son os est imagée, traduite sur une imprimante 3D et directement imprimée dans la cavité de ses propres cellules », suppose-t-il. Des chirurgiens et des fabrications de technologies médicales se sont déjà montrés très intéressés par cette technologie, selon les chercheurs. Mais avant d'entamer l'étape de la commercialisation, le COBICS doit passer les essais cliniques sur les animaux puis sur les humains. Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash AFM | | ^ Haut | |
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| | | Des chercheurs de l’Université de Duke ont fait la démonstration d’un dispositif de chauffage et de refroidissement pour la climatisation des bâtiments qui, s’il était largement déployé aux États-Unis, pourrait réduire la consommation d’énergie de la climatisation de près de 20 %. L’invention fait appel à une combinaison de mécanique et de science des matériaux pour capter ou expulser certaines longueurs d’onde de la lumière. Selon les conditions, des rouleaux déplacent une feuille d’avant en arrière pour exposer soit des matériaux qui retiennent la chaleur sur une moitié, soit des matériaux qui refroidissent sur l’autre. Spécialement conçu à l’échelle nanométrique, un matériau absorbe l’énergie du soleil et piège la chaleur existante, tandis que l’autre réfléchit la lumière et permet à la chaleur de s’échapper à travers l’atmosphère terrestre et dans l’espace. « Je pense que nous sommes les premiers à faire la démonstration d’un contact thermique réversible, qui nous permet de passer d’un mode de chauffage ou de refroidissement à l’autre », a déclaré Po-Chun Hsu, professeur adjoint de génie mécanique et de science des matériaux à Duke et chef de l’équipe. « Cela permet au matériau d’être mobile tout en maintenant un bon contact thermique avec le bâtiment pour soit faire entrer de la chaleur, soit en faire sortir ». Environ 15 % de la consommation d’énergie aux États-Unis, et plus de 30 % dans le monde, est destinée au chauffage et au refroidissement des bâtiments, qui sont responsables d’environ 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Pourtant, jusqu’à présent, la plupart des approches visant à réduire l’empreinte carbone n’a porté que sur le chauffage ou le refroidissement. Cela laisse les zones climatiques tempérées du monde qui ont besoin à la fois de chauffage et de refroidissement pendant l’année – ou parfois en 24 heures – dehors dans le froid. Dans ce nouvel article, M. Hsu et son équipe font la démonstration d’un dispositif qui pourrait nous permettre de rester au chaud ou au frais lorsque le temps change. Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash Nature | | ^ Haut | |
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| Santé, Médecine et Sciences du Vivant | |
| | | La perte des synapses, c’est-à-dire des points de contact entre deux cellules nerveuses, est un signe précoce de lésion du cortex cérébral chez les personnes souffrant de sclérose en plaques progressive. Une équipe de recherche germano-suisse, associant les universités de Genève (UNIGE) et de Munich (LMU), a voulu mieux comprendre comment les synapses se dégradaient, et quels étaient les dommages neuronaux qui en résultaient. Grâce à diverses méthodes d’imagerie, les scientifiques ont pu observer cette perte de synapses généralisée chez des souris atteintes de la même maladie : les pointes neuronales où se situent les synapses sont en effet attaquées par certaines cellules immunitaires. « Il semblerait que l’inflammation due à la réponse immunitaire erronée déclenche un afflux de calcium qui endommage ces pointes neuronales, » explique Martin Kerschensteiner, directeur de l’Institut de neuro-immunologie clinique de la LMU. Ces travaux ont pu montrer que ces réactions inflammatoires, qui apparaissent dans les stades tardifs de la sclérose en plaque, rappellent les modifications cérébrales observées dans les premiers stades des maladies neurodégénératives. La perte affecte principalement les synapses excitatrices qui transmettent des impulsions à d’autres neurones. En conséquence, l’activité des neurones diminue et le réseau neuronal dans le cerveau est affaibli. « Ainsi, peu à peu, les neurones deviennent muets », souligne Martin Kerschensteiner. « À notre surprise, cependant, nous avons constaté que ce processus était réversible ! ». En effet, dès l’inflammation maîtrisée, le nombre de synapses s’est rétabli et les neurones ont retrouvé leur activité initiale. Ces résultats surprenants contredisent la croyance selon laquelle le cortex est endommagé de façon permanente chez les patients atteints de sclérose en plaque progressive. « Dans la sclérose en plaques, en effet, l’inflammation est persistante et empêche les mécanismes de réparation synaptique de se produire », explique Doron Merkler. « Dans notre modèle, en revanche, il s’agit d’une inflammation aiguë qui, correctement prise en charge par des moyens médicamenteux, se résorbe après quelques jours ». Afin d’exploiter cette découverte à des fins thérapeutiques, il reste à identifier un nouveau composé capable d’inhiber l’activation des cellules immunitaires responsables de la dégradation des synapses, et ainsi ralentir la progression de la maladie. Cependant, seul un traitement permettant de ne pas bloquer complètement la fonction des cellules immunitaires – pour que celles-ci puissent continuer à remplir d’autres fonctions essentielles – serait réellement efficace. Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash UNIGE | | | |
| Avant d’arriver dans l’intestin et les voies urinaires de leur hôte humain, les entérobactéries comme Escherichia coli et Salmonella doivent traverser notre estomac où le milieu très acide joue un rôle de bactéricide. La survie comme le potentiel infectieux et pathogène des entérobactéries dépendent donc de leur capacité à répondre à ce stress acide. En combinant deux techniques de pointe, la microscopie de fluorescence à super résolution en trois dimensions et la cryo-microscopie électronique, des chercheurs du CEA-Irig (IBS) ont montré comment les entérobactéries peuvent survivre à l’acidité de notre estomac en polymérisant une de leurs protéines sous forme de filaments. Ce mécanisme consomme des ions hydrogène du milieu et libère du gaz carbonique, ce qui réduit l’acidité à l’intérieur et autour de la bactérie. Grâce à la microscopie de fluorescence à super résolution en trois dimensions, les chercheurs de l’IBS ont montré que les filaments de LdcI s’organisent en-dessous de la paroi bactérienne. La structure atomique de ces filaments a été obtenue par cryo-microscopie électronique. Une combinaison de ces résultats a permis d’élaborer un modèle du mécanisme d’action de cet enzyme lors de la réponse entérobactérienne au stress acide. Ces travaux ont permis par ailleurs de développer une méthode générale, applicable à tout type de cellules, pour étudier des assemblages moléculaires en combinant les deux types de microscopies. Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash CEA | | | |
| On sait depuis longtemps que les cellules cancéreuses utilisent l’énergie contenue dans le glucose d’une manière totalement différente, en comparaison aux autres cellules de l’organisme. Ce processus de transformation de la matière en énergie ne repose pas sur la combustion, mais sur la fermentation. Le médecin allemand, prix Nobel de médecine en 1931, Otto Heinrich Warburg, a découvert ce phénomène en 1921, il a ensuite pris son nom et est devenu l’effet Warburg. Depuis, des scientifiques à travers le monde s’interrogent : pourquoi les cellules cancéreuses ont recours à ce processus, alors qu’il n’est pas le plus efficace pour transformer l’énergie ? Selon ces travaux, c’est une enzyme, appelée phosphoinositide 3-kinase (PI3) qui jouerait un rôle-clé dans ce mécanisme. « La kinase PI3 est une molécule fondamentale émettrice de signaux, elle fonctionne presque comme un commandant en chef du métabolisme cellulaire », précise Ming Li, auteur principal de l’étude. Elle est impliquée dans la division, la croissance et la survie des cellules. Dans le cas du cancer, les signaux qu’elle émet participent également au développement de la maladie. Lorsque les cellules cancéreuses utilisent l’effet Warburg, le niveau de PI3 augmente à l’intérieur des cellules. Les enzymes transmettent aux cellules cancéreuses un signal qui les conduit à se diviser ensuite. « C’est l’une des trajectoires de signalement les plus actives dans le can cer », précise l’auteur. Pour mieux comprendre pourquoi ce phénomène repose sur l’effet Warburg, les chercheurs ont analysé le même effet ailleurs dans l'organisme : dans les cellules immunitaires. Ces dernières utilisent le même procédé de transformation de l’énergie. « Lorsque les cellules immunitaires sont prévenues de la présence d’une infection, les cellules T passent de la méthode de combustion classique à la métabolisation de Warburg », expliquent les chercheurs. Celle-ci permet de produire de l’ATP, qualifiée de monnaie énergétique des cellules par les chercheurs. Ce processus de "switch" d’une méthode de transformation à une autre repose sur l’enzyme LDHA, pour lactate deshydrogénase A. Or, lorsque cette enzyme manque, les cellules ne sont plus capables de maintenir leur niveau de PI3, ce qui bloque la division des cellules T et les empêche de combattre les infections. D’après Ming Li, l’observation des cellules immunitaires fournit une explication à l’utilisation de l’effet Warburg : comme les cellules ont besoin d’ATP rapidement pour démarrer leur processus de division, elles s’appuient sur ce mécanisme. Les cellules cancéreuses utiliseraient le même procédé pour maintenir l’envoi des signaux aux différentes cellules, et assurer ensuite la poursuite de leur croissance et de leur division. Les chercheurs aimeraient mettre ces découvertes en application : bloquer l’activité de LDHA pourrait ainsi permettre de bloquer la croissance des cellules cancéreuses. Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash Science | | | |
| Avec l'important développement de l'éolien terrestre, un débat récurrent s'est ouvert depuis quelques années sur les possibles effets néfastes pour la santé humaine des ondes à basses fréquences, ou infrasons, émises par ces machines. Selon l’Ademe, les éoliennes émettent un bruit de fond, principalement des basses fréquences entre 20 Hz et 100 Hz. À 500 mètres de distance, le minimum légal entre une éolienne et habitation, le bruit est généralement inférieur à 35 décibels, soit moins qu’une conversation à voix basse. Une étude du Centre de recherche technique de Finlande (VTT) vient de montrer que les sons de basses fréquences, inaudibles, émis par les éoliennes, ne sont pas nuisibles à la santé humaine. Les chercheurs ont analysé pendant deux ans, à la demande du gouvernement finlandais, les effets des émissions sonores de basse fréquence — ou infrasons — émis par les éoliennes qui ne peuvent être entendues par une oreille humaine. Les résultats « ne soutiennent pas l'hypothèse selon laquelle les infrasons (…) causent une gêne, ont conclu les chercheurs. Il est plus probable que ces symptômes soient déclenchés par d'autres facteurs tels que des symptômes attendus » par les personnes vivant à proximité d'éoliennes. Lors d’une simulation des émissions sonores des éoliennes, aucune réaction du système nerveux autonome aux infrasons n’a pu être mesurée. L’étude considère l’effet dit « nocebo » (analogue à l’effet placebo, mais de manière inversée) comme une explication de l’apparition prétendument fréquente de symptômes à proximité d’éoliennes : des circonstances physiquement inoffensives peuvent avoir un effet négatif sur la santé dans la mesure où les personnes concernées suspectent un impact négatif. Des symptômes ayant d’autres causes pourraient également être associés de manière erronée aux éoliennes. Pour l’étude, les chercheurs se sont basés sur des interviews, des enregistrements sonores et des tests de laboratoire pour étudier les effets possibles de ces sons sur la santé de ceux vivant à moins de 20 kilomètres de générateurs. Les tests n'ont pas montré que les sons des turbines perturbaient le rythme cardiaque. Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash CTT | | | |
| La prise compulsive d’aliments (binge eating disorder) dans l’enfance a déjà été reliée à divers problèmes de santé ultérieurs, rappelle une équipe de l’École de médecine de l’Université Emory (Atlanta, aux États-Unis) dans la revue Psychiatry Research. Or certains facteurs parentaux, comme la mauvaise régulation des émotions, sont susceptibles d’influencer négativement les comportements d’autorégulation des enfants, en particulier dans le domaine de l’alimentation. Avec une prévalence d’environ 2 % aux États-Unis, le phénomène de prise alimentaire compulsive constitue un trouble commun du comportement alimentaire, pour lequel semblent impliqués à la fois des « vulnérabilités génétiques » et des « facteurs de l’environnement socio-familial », ces derniers faisant précisément l’objet de cette étude (réalisée auprès de 48 dyades mère-enfant). Les troubles de l’alimentation de l’enfant ont été appréciés notamment à l’aide de l’échelle des troubles de l’alimentation excessive chez les enfants (Child Binge Eating Disorder Scale). Ont aussi été évalués (ou auto-évalués) la dysrégulation émotionnelle, le contrôle attentionnel, et le fonctionnement exécutif. Cette étude montre que la performance de la mère sur une tâche de mémoire de travail et la dysrégulation émotionnelle de l’enfant sont « significativement associées » aux symptômes de prise alimentaire compulsive chez l’enfant. Confirmant une association entre le fonctionnement exécutif maternel et les comportements d’autorégulation chez l’enfant, cette étude suggère aux auteurs l’existence d’un mécanisme possible par lequel des comportements alimentaires inadaptés peuvent émerger de manière précoce dans le développement de l'enfant. Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash Academia | | | |
| Troisième cause de décès par cancer chez les hommes en France, le cancer de la prostate se soigne principalement par la suppression des androgènes (ou de leurs récepteurs), car cette hormone mâle est utilisée par ce type de cancer en particulier pour se développer. Mais certaines formes résistantes n’ont pour l’heure pas trouvé de remède durable, d’où la nécessité de développer de nouvelles thérapies. Les biologistes ont découvert que la quantité de protéines CRY-1 impliquées dans les rythmes circadiens (l’horloge biologique) augmentait dans les cellules cancéreuses lors des derniers stades de la maladie, et était associée à de mauvais pronostics de guérison. Plus précisément, ces protéines joueraient un rôle dans la genèse des tumeurs de la prostate mais aussi dans la résistance des tumeurs face au traitement. En se basant sur des études récentes soulignant l’importance des récepteurs aux androgènes dans le processus de réparation de l'ADN dans les cancers de la prostate, les chercheurs ont mis en évidence que la quantité de protéine CRY-1 est augmentée lors de la fixation des androgènes sur leurs récepteurs dans des tissus tumoraux prostatiques obtenus sur des patients malades. Plusieurs études épidémiologiques montraient déjà que des perturbations du rythme nycthéméral, tels que des décalages horaires, le travail de nuit, des problèmes de sommeil ou encore la diminution de la production de mélatonine (produite dans l’obscurité) sont autant de facteurs qui augmentent le risque de développer un cancer de la prostate, du sein ou du côlon, et réduisent l’efficacité des traitements anticancéreux. « Le mécanisme exact de ce lien entre désynchronisation circadienne et maladie n’est, encore, pas totalement compris », détaille le chronobiologiste argentin Diego Golombek, de l’Université de Quilmes. « On sait en revanche que cela dérègle beaucoup, voire tous les processus métaboliques dans le corps ». Les auteurs de l’étude expliquent qu’une telle découverte montre que CRY-1 régule l'expression des gènes bien au-delà de celle associée aux rythmes circadiens. En effet, sur 1929 gènes auxquels se lie CRY-1 (la liaison d'une protéine sur un gène régulant son expression), seuls 49 régulent les rythmes circadiens, soit à peine 2,5 %. Les traitements contre la maladie visent au mieux à éliminer les cellules cancéreuses, sinon à faire cesser leur multiplication. Pour ce faire, des dommages sont volontairement causés à l’ADN, ce qui peut entraîner l’arrêt de la réplication des cellules voire leur apoptose (mort cellulaire) en cas de lésions sévères. De la même façon, en exposant des cellules cancéreuses à des radiations (action qui permet de faire muter l’ADN), l’équipe a sondé le rôle possible de CRY-1 dans la réparation de l'ADN dans des cellules cultivées, dans des modèles animaux et dans des tissus prélevés sur des patients atteints d'un cancer de la prostate. Résultat : CRY-1 régule directement la disponibilité de facteurs biologiques essentiels aux mécanismes de réparation, et elle modifie la façon dont le cancer répond aux dommages de l’ADN. La protéine CRY-1 offrirait donc aux cellules cancéreuses un effet protecteur contre les thérapies d’endommagement de l’ADN, en favorisant à la fois la réparation de l’ADN des cellules cancéreuses et la réplication de ces mêmes cellules. « L’implication de cette protéine dans la réponse aux dommages n’était pas particulièrement nouvelle » explique Anne-Laure Huber, du Centre de recherche en cancérologie de Lyon. « En revanche, la découverte sur la façon dont CRY-1 régulerait des gènes et l’utilisation de la signalisation à androgènes est novatrice ». Cela expliquerait les mauvais pronostics des traitements ciblant les androgènes dans les derniers stades de la maladie. Par ailleurs, cela indique qu’en cas de niveaux élevés de CRY-1 dans une tumeur, les techniques de dommages de l’ADN seront moins efficaces. Dans une visée thérapeutique, l’équipe prévoit maintenant d'explorer la meilleure façon de cibler et de bloquer le gène cry1 qui code la protéine CRY-1. Les chercheurs comptent également utiliser d’autres thérapies déjà existantes qui agiraient en synergie pour entraver la réparation de l'ADN dans les cellules cancéreuses de la prostate. Les auteurs – tout comme Anne-Laure Huber et Diego Golombek – suggèrent par ailleurs d’aligner le traitement avec les rythmes naturels ou de le donner à certains moments de la journée où il serait plus efficace. A terme, les biologistes prévoient d'étudier davantage de gènes impliqués dans l’horloge biologique et de déterminer comment la perturbation circadienne peut affecter le traitement du cancer. Un projet complexe alors qu’une même protéine ou un même gène peut favoriser un type de cancer, et prévenir d’un autre. Par ailleurs, aucune donnée ne semble universelle entre les patients : « les rythmes circadiens sont intrinsèques à chacun, on ne pourra peut-être pas standardiser les protocoles, et il faudra alors prédire grâce à des modèles mathématiques le traitement le plus adapté pour chaque patient », conclut Anne-Laure Huber. Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash La Recherche | | | |
| Selon des chercheurs japonais, la vitamine B6 (pyridoxine) pourrait contribuer à prévenir les formes graves de COVID-19, ses complications dont notamment la tempête de cytokines. La vitamine B6 pourrait également dissoudre les caillots sanguins fréquemment associés au décès par COVID-19. Alors que peu de recherches encore ont regardé les effets de B6 en prévention de COVID-19, cette équipe de l’Université d'Hiroshima apporte de premières données prometteuses, avec cet examen de la littérature publié dans la revue Frontiers in Nutrition. Les chercheurs japonais appellent les autres scientifiques à étudier son rôle possible contre la maladie. « Qui aurait pensé qu'un petit composé basique comme la vitamine B6, présente dans la banane ou le poisson, pouvait être une clé de la réponse immunitaire contre le COVID-19 ? », écrivent les chercheurs dans leur communiqué. Si quelques études ont regardé les avantages des vitamines D et C et de certains minéraux comme le zinc et le magnésium pour renforcer la réponse immunitaire contre le COVID-19, la recherche sur la vitamine B6 en est à ses tout débuts. Thanutchaporn Kumrungsee, nutritionniste, révèle ici le potentiel possible de B6 à réduire les symptômes de la maladie. D'une manière plus générale, la vitamine B6 exerce un effet protecteur contre les maladies chroniques telles que les maladies cardiovasculaires et le diabète en supprimant l'inflammation, les inflammasomes, le stress oxydatif et le stress carbonyle. La vitamine B6 est documentée comme un nutriment anti-inflammatoire et anti-thrombotique qui peut contribuer à améliorer la réponse aux infections à coronavirus et virus grippaux qui peuvent causer des lésions pulmonaires mortelles et le syndrome de détresse respiratoire aiguë. La vitamine B6 pourrait ainsi à la fois lutter contre les tempêtes de cytokines, liées à une inflammation des cellules endothéliales capillaires pulmonaires, à une infiltration des neutrophiles et à une augmentation du stress oxydatif, et contre les caillots sanguins qui peuvent bloquer les capillaires, endommageant les organes vitaux comme le cœur, les poumons, le foie et les reins. Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash Frontiers | | | |
| Une équipe de recherche internationale, menée par Grégoire Courtine (EPFL / CHUV) et Aaron Phillips (UCalgary), a mis au point un dispositif susceptible d’améliorer drastiquement la vie des patients atteints d’une lésion de la moelle épinière. « L’instabilité de la pression sanguine est une conséquence sérieuse et méconnue de ces blessures », souligne Aaron Philips, membre du Hotchkiss Brain Institute et du Libin Cardiovascular Institute à la Cumming School of Medicine, co-premier auteur. « Nous avons créé la première plateforme permettant de comprendre les mécanismes en cause dans cette instabilité, ce qui nous a permis de développer une nouvelle solution de pointe ». Les scientifiques s'appuient sur leurs travaux qui ont déjà permis à de nombreux patients paraplégiques de retrouver le contrôle de leurs jambes grâce à une stimulation électrique épidurale (EES). Dans cette nouvelle étude, ils proposent à nouveau d’utiliser ces stimulations ciblées de la moelle épinière au-dessous de la lésion, comme pour restaurer la fonction motrice. Mais au lieu de cibler les régions de la moelle qui commandent les mouvements des jambes, ils ciblent cette fois les circuits neuronaux qui régulent la tension artérielle. Ils les couplent en outre avec un capteur de tension implanté dans une artère. Lorsque celui-ci détecte une baisse de tension anormale, il communique avec un pacemaker qui envoie une série d’impulsions à des endroits précis de la moelle épinière. Ces stimulations électriques dites biomimétiques ont pour effet d’activer le système hémodynamique naturel. « Nous parvenons ainsi à compenser la rupture de communication provoquée par la lésion entre le système nerveux central et le système sympathique », précise Grégoire Courtine. Les travaux décrits dans Nature ont d'abord été réalisés sur des modèles précliniques. Ces tests menés sur des rats et des primates non-humains ont permis de comprendre et d’identifier précisément où et comment la stimulation électrique devait être appliquée pour obtenir la réponse hémodynamique souhaitée. Jocelyne Bloch, la neurochirurgienne qui dirige le centre NeuroRestore avec Grégoire Courtine et qui a réalisé les implantations chirurgicales, s’étonne de la réactivité de la stimulation : « C’était impressionnant d’observer l’augmentation immédiate de la pression artérielle au niveau désiré dès que la stimulation était enclenchée ». Le traitement a ensuite été appliqué à un premier patient humain. « Je subissais quotidiennement ces chutes de tension, surtout le matin et le soir. Depuis que j’ai l’implant, cela n’arrive plus que de façon exceptionnelle - à peine une fois par quinzaine » dit Richi, 38 ans, lui-même chirurgien, qui est devenu tétraplégique à la suite d’un accident. « Ces épisodes d’hypotension étaient extrêmement pesants. Ils s’accompagnent de troubles visuels et empêchent d’accomplir les actes les plus simples de la vie quotidienne. Les stimulations me procurent un énorme soulagement, bien plus efficace que les médicaments ». Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash EPFL | | | |
| Une étude menée par les chercheurs de l’Université de Boston (Etats-Unis) a montré que le fait de déclencher la maladie d’Alzheimer ne signifiait pas forcément souffrir d’une grave démence. Ces travaux montrent que plus de la moitié des cas de la maladie d’Alzheimer souffrent de légères démences et seul un patient sur cinq représente un cas de démence grave. Pour arriver à cette conclusion, les chercheurs se sont intéressés aux données de la Framingham Heart Study (FHS), une étude épidémiologique américaine au long cours qui a débuté en 1948. Les personnes participant au FHS ont entre 50 et 94 ans et sont susceptibles de développer des troubles cognitifs légers et la maladie d’Alzheimer. Pour cette recherche, les chercheurs ont ciblé les personnes souffrant d’Alzheimer et de troubles cognitifs légers sur trois fenêtres temporelles: 2004-2005, 2006-2007 et 2008-2009. En analysant les résultats, ils se sont aperçus que 50,4 % des participants retenus souffrant de la maladie d’Alzheimer étaient des cas légers de démence, qu’un peu moins d'un tiers (30,3 %) des cas sont modérés et 19,3 % sont des cas graves. Parmi tous les participants atteints de troubles cognitifs légers et de la maladie d’Alzheimer, le pourcentage mis en commun était de 45,2 % pour le groupe combiné de démence légère et de troubles cognitifs légers qui ont ensuite évolué vers la maladie d’Alzheimer. « L’intervention précoce dans les cas de troubles cognitifs légers ou de démence légère a été le principal objectif de la recherche sur la maladie d’Alzheimer et du développement de médicaments au cours des dernières années », indique Rhoda Au, professeur d'anatomie et de neurobiologie à la faculté de médecine de l'Université de Boston et auteur correspondant de l’étude. « Nous avons constaté qu'environ 45 % des personnes atteintes de troubles cognitifs ou ayant reçu un diagnostic de démence associée à la maladie d’Alzheimer avaient une maladie d’Alzheimer précoce. Nos résultats servent à éclairer la conception des futures études de recherche, telles que les études cliniques et d'observation, et permettent une alloc ation optimale des ressources pour l'élaboration des politiques ». De plus, pour les chercheurs, le fait que la moitié des personnes vivant avec la maladie d’Alzheimer souffrent d’une maladie légère souligne la nécessité d’effectuer des recherches et des interventions pour ralentir le déclin ou prévenir la progression de la maladie. Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash IOS | | | |
| L’équipe de Lutz Jäncke à l’Université de Zurich a comparé à l’aide d’un procédé d’imagerie cérébrale les réseaux neuronaux de 50 non-musiciens à ceux de 103 musiciens professionnels, étudiants en musique ou musiciens amateurs bien formés. Les chercheurs ont constaté que les zones chargées de l’audition dans les hémisphères cérébraux gauche et droit travaillaient de manière beaucoup plus synchronisée chez les musiciens. Elles étaient en outre mieux connectées entre elles. Un «câblage» nettement plus fort a aussi été mis en évidence entre les centres auditifs et différents lobes cérébraux assurant la gestion d’informations complexes. « Nous supposons que ce sont les années d’exercice qui ont synchronisé les régions cérébrales chez les musiciens professionnels », a indiqué le Professeur Jäncke à Keystone-ATS. La coordination ainsi apprise entre l’audition et les actions motrices – comme bouger les doigts sur les touches d’un piano – laisse des traces bienvenues dans le cerveau, ajoute le spécialiste. Et plus ils ont commencé tôt, plus elles sont marquées. De précédentes études ont également montré que les musiciens s’en sortent mieux dans les exercices de mémoire et souffrent moins fréquemment de démence. Les scientifiques ont également tenté de déterminer dans le cerveau des participants ce qui fait que les uns ont «l’oreille absolue» et d’autres pas. Cette capacité – Mozart, Bach et Michael Jackson l’avaient – est l’aptitude à reconnaître, à l’écoute d’un son, les notes correspondantes sans référence auditive préalable. Sur les 103 musiciens, 52 avaient l’oreille absolue, 51 pas. Résultat : les cerveaux des uns et des autres avaient des structures étonnamment similaires et les chercheurs n’ont pu mettre en évidence aucune différence significative. « Cela nous a beaucoup surpris », commente Lutz Jäncke, qui n’entend toutefois pas en rester là. Son équipe développe actuellement un test pour mieux différencier les musiciens ayant l’oreille absolue entre eux. Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash TdG | | | |
| Des scientifiques de l’EPFL ont découvert que des agrégats de protéines semblables à ceux dans la maladie d’Alzheimer sont à l’origine de la détérioration musculaire observée avec le vieillissement. Mais on peut agir contre les effets de ces agrégats en stimulant le taux de nicotinamide adénine dinucléotide (NAD+), ce qui active les systèmes de défense des mitochondries dans les cellules et rétablit la fonction musculaire. Plus on vieillit, plus nos muscles s’affaiblissent, ce qui explique la fragilité et l’incapacité physique qui accompagnent la vieillesse. Cette détérioration musculaire, outre le fait qu’elle concerne chaque individu, représente une charge très lourde pour les systèmes publics de santé. Les travaux de recherche dans les processus biologiques et les biomarqueurs qui définissent le vieillissement musculaire n’ont pas encore permis de déterminer les causes sous-jacentes. Aujourd’hui, une équipe de scientifiques du laboratoire de Johan Auwerx à la Faculté des sciences de la vie de l’EPFL s’est penchée sur la question sous un angle différent : les similitudes entre le vieillissement musculaire et les maladies musculaires dégénératives. Ils ont découvert que des agrégats de protéines se déposent dans les muscles du squelette pendant le vieillissement naturel, et qu’en les bloquant on peut prévenir les effets néfastes du vieillissement musculaire. « Dans les maladies musculaires liées à l’âge, comme la myosite à inclusions, nos cellules luttent pour maintenir un pliage correct des protéines, amenant les protéines mal repliées à précipiter. Celles-ci forment des agrégats de protéines toxiques dans les muscles », explique Johan Auwerx. « Le composant principal de ces agrégats de protéines est la bêta-amyloïde, comme dans les plaques amyloïdes dans le cerveau des patients atteints de la maladie d’Alzheimer ». Dans cette étude, les scientifiques identifient les agrégats de protéines de type amyloïdes dans les muscles matures de différentes espèces, du nématode C. elegans aux êtres humains. Ils ont également découvert que ces agrégats dégradent la fonction mitochondriale. Bien qu’on ait suggéré que ces protéines agrégées contribuent au vieillissement du cerveau, c’est la première fois qu’on démontre qu’elles participent au vieillissement musculaire et dégradent directement les mitochondries. « Ces agrégats protéotoxiques anormaux pourraient servir de nouveaux biomarqueurs pour le processus de vieillissement, au-delà du cerveau et des muscles », ajoute Johan Auwerx. Mais est-il possible d’infléchir la formation des agrégats de protéines ? Pour y répondre, les chercheurs ont administré à des vers la vitamine nicotinamide riboside et l’anticancéreux Olaparib. Tous deux stimulent le taux de nicotinamide adénine dinucléotide (NAD+), une biomolécule essentielle au maintien de la fonction mitochondriale, et dont le taux décline au cours du vieillissement. Chez les vers, les deux composés ont activé les systèmes de défense des mitochondries, même quand ils sont administrés à un âge avancé. L’activation du « système de contrôle qualité des mitochondries » a réduit les agrégats de protéines amyloïdes liés à l’âge et a amélioré la santé et l’espérance de vie des vers. Les scientifiques ont ensuite travaillé sur des tissus musculaires humains, prélevés sur des sujets âgés et des patients atteints de myosite à inclusions. L’activation des mêmes systèmes de contrôle qualité des mitochondries a engendré des améliorations similaires de l’homéostasie protéique et mitochondriale. Ces résultats encourageants ont amené les chercheurs à tester la nicotinamide riboside sur des souris âgées. Le traitement a également activé les systèmes de défense des mitochondries et a réduit le nombre et la taille des agrégats amyloïdes dans différents tissus musculaires du squelette. « Les médicaments qui stimulent le contrôle qualité des mitochondries peuvent donc être testés en phase clinique pour contrer les effets de ces agrégats protéotoxiques liés à l’âge et rajeunir les tissus », confie Mario Romani, le premier auteur de l’étude. Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash EPFL | | | |
| « Personne n’avait jamais vu ça. On n’y croyait pas nous-mêmes ». Voici ce que se sont dit, sans concertation préalable, deux équipes françaises après la découverte de phénomènes surprenants au cœur de la vie des cellules. Les deux groupes étudient le même objet aux propriétés déroutantes : les microtubules. Il s’agit de longs tubes (des dizaines de micromètres) fins (25 nanomètres de diamètre), petits « spaghettis » qui tiennent lieu de squelette pour les cellules, mais aussi d’autoroutes pour le transport de diverses molécules en leur sein. Le tout en agitation permanente, faite de déplacements, de créations, de destructions… Les plus connus de ces tubes guident les signaux nerveux le long des axones des neurones ou bien font osciller de nombreux cils ou flagelles, comme ceux de la queue des spermatozoïdes. La première équipe (Institut Curie, Hôpital Cochin, Institut Max-Planck de Dresde et Université de Bonn, Allemagne) s’est justement intéressée à cet appendice battant, dont un dérèglement de la machinerie est cause d’infertilité. Un flagelle bouge et ondule, grâce aux microtubules, qui eux-mêmes oscillent grâce à une technique analogue au sport basque du paquito, où les participants assis à la queue leu leu font avancer un de leurs équipiers, allongé sur leurs bras levés. Cela demande de la force et de la synchronisation. Idem pour le flagelle. Des moteurs moléculaires, appelés dynéines, ont une extrémité bien accrochée sur une première couche de microtubules, quand leurs autres extrémités, les « bras », peuvent s’accrocher ou se détacher d’une seconde couche de microtubules autour de la première. En poussant et tirant régulièrement, l’assemblée des dynéines fait onduler le supérieur et crée le battement de la queue du spermatozoïde, qui ainsi file droit vers les ovules. Sauf si les microtubules sont très légèrement perturbés, comme les chercheurs l’expliquent à la « une » de Science du 8 janvier. En modifiant génétiquement des souris, ils ont empêché l’arrivée de seulement quelques acides aminés sucrés, des glycines, en surface des microtubules, sans gêner la vie des mammifères. « On avait failli abandonner, car ce changement semblait n’avoir aucun effet. Même les spermatozoïdes semblaient normaux », rappelle Carsten Janke, directeur de recherche au CNRS et responsable de cette équipe. En étudiant mieux le comportement des gamètes, ils ont néanmoins découvert que certains ne se déplacent plus en ligne droite mais tournent en rond. « Il a fallu plonger jusqu’au niveau moléculaire pour comprendre comment une modification, a priori non essentielle, pouvait avoir de telles conséquences physiologiques », explique Carsten Janke. « Cette étude montre qu’il a fallu combiner plusieurs méthodes (modification génétique, biologie cellulaire, microscopie électronique), à plusieurs échelles (de la souris à la molécule), pour identifier et comprendre le problème. « C’est magnifique, et cela témoigne bien de l’importance des collaborations », apprécie Manuel Théry, chercheur au CEA au laboratoire Cytomorpho (Université Grenoble-Alpes/Université de Paris), dans l’autre équipe qui a étudié les microtubules. Lui aussi a donc repéré un effet que personne n’avait vu jusqu’alors. « Pendant le paquito moléculaire, l’équipier qui avance se fait arracher sa tenue, sa peau, ses bras… au point de finir complètement disloqué ! ». Autrement dit, les moteurs moléculaires se fixant aux microtubules pour avancer ou tirer dessus les détruisent… Alors qu’un microtubule reste entier pendant vingt minutes, avec des dynéines sur lui, il se disloque en douze minutes, comme les chercheurs l’ont expliqué dans Nature Materials le 21 janvier. Mais il y a « mieux » : la route tubulaire se répare toute seule face à ses détériorations. Le phénomène avait déjà été observé il y a plusieurs années par la même équipe, qui en comprend désormais un nouvel intérêt pour les cellules. « C’est comme si les voitures circulant sur une route abîmaient cette route. Plus il y a de voitures, plus la route est abîmée, et donc plus on la répare », résume Manuel Théry. Or les microtubules « neufs » attirent davantage les divers moteurs qui interagissent avec eux, ce qui fait que la détérioration favorise la circulation. « Plus les microtubules sont utilisés, plus ils sont utilisables. Aucun matériau passif ne se comporte comme ça. Cela reste à démontrer, mais nous pensons que ce mécanisme pourrait définir des axes préférentiels qui correspondent aux besoins du système. Une route neuve attire plus de voitures et devient une autoroute, alors que pendant ce temps les routes de campagne sont peu empruntées et s’abîment, ce qui les rend moins praticables… » La démonstration est en cours. Carsten Janke reste impressionné par ces découvertes. « La vie est dynamique jusqu’au niveau moléculaire. Rien n’est figé. C’est fascinant ». Article rédigé par Georges Simmonds pour RT Flash Le Monde | | ^ Haut | |
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