Médias : l'asphyxie Face à la crise du coronavirus, les médias prennent l'eau (notamment parce que les annonceurs ne souhaitent pas être associés au coronavirus comme évoqué précédemment dans notre enquête), et cherchent activement des solutions. Story Jungle prend le pouls de cette situation inédite. Tour d'horizon d'un écosystème éprouvé. - En France, la rapporteure de la loi sur l'audiovisuel, Aurore Bergé, plaide pour la création d'un crédit d'impôt « transitoire », de façon à ce que les annonceurs maintiennent leurs investissements auprès des médias. « Toute mesure qui soutient l'écosystème de la communication et des médias est plus que nécessaire en ce moment », commente auprès de Story Jungle Bertrand Beaudichon, président d'Initiative France et ex-président de l'Udecam – à retrouver dans notre interview de cette semaine. Il ajoute cependant que « le problème de cette mesure est qu'il faut avoir nécessairement des impôts à payer. Or, la situation est telle que les annonceurs ne vont pas avoir beaucoup d'impôts à payer cette année, étant donné les pertes en cours ». Les radios privées – RTL, Europe 1, RMC, NRJ Group, Nova – ont sollicité l'aide de l'État et du CSA, face à une chute de 80 % de leurs revenus. « Certains gouvernements européens, comme en Espagne, s'apprêtent à verser directement des subventions aux groupes médias afin de compenser la perte de leurs ressources, eu égard au rôle prépondérant des radiodiffuseurs pendant le confinement », ont-elles fait savoir dans un courrier adressé à Franck Riester, ministre de la Culture. - Les médias britanniques « pourraient s'effondrer en raison du adblocking concernant le coronavirus », a alerté le Guardian cette semaine. Les annonceurs sont invités à abandonner les listes de blocage car les articles en ligne génèrent un trafic record mais... peu de revenus. Les éditeurs ont tablé sur une perte qui pourrait aller jusqu'à 50 millions de livres sterling de revenus, menaçant directement les emplois dans les rédactions. - La presse américaine est également lourdement affectée par la crise. De nombreux éditeurs réclament un plan d'urgence pour la presse, notamment pour les titres régionaux. « Le plus grand groupe de presse locale, Gannett, qui détient plus de 260 titres dont USA Today, a ainsi annoncé une nouvelle série de mesures pour réduire ses coûts, dont un programme de chômage partiel dans ses rédactions, d'avril à juin. Son patron, Paul Bascobert, a aussi renoncé à son salaire pendant la crise », rapporte Les Echos. - Facebook à la rescousse : l'entreprise lance un fonds de soutien aux médias locaux européens de 3 millions d'euros, destinés « aux groupes de presse indépendants de petite et moyenne taille qui sont les plus fragilisés par la crise, dans les pays qui sont le plus touchés à travers l'Europe », précise Facebook. Qui avec Google, rappelons-le, capte l'essentiel des revenus publicitaires du digital. | JUNGLE STORIES | « Le soutien à l'écosystème de la communication et des médias est plus que nécessaire»
Depuis le début du confinement, les recettes publicitaires connaissent une chute vertigineuse. Afin d'aider les médias à sortir la tête de l'eau, Aurore Bergé, rapporteure du projet de loi sur l'audiovisuel, plaide pour la mise en place d'un crédit d'impôt sur les dépenses de communication. Bertrand Beaudichon, CEO d'Initiative, agence média du groupe IPG Mediabrands, et ancien président de l'Udecam, évoque avec nous l'importance de ce dispositif et les nouvelles dynamiques d'un secteur ébranlé par une crise sans précédent. | | UN PAVÉ DANS LA JUNGLE | C'est une victoire qui arrive à point nommé, dans une guerre semée d'embûches. Après avoir été saisie en novembre 2019 par les syndicats d'éditeurs de presse français, l'Autorité de la concurrence s'est prononcée jeudi 9 avril sur le contentieux qui oppose Google aux éditeurs, dans le cadre de l'application du droit voisin en France. Elle réclame que le géant américain « négocie de bonne foi » avec les éditeurs de presse, et ce, dans un délai de trois mois. Une négociation portant sur la rémunération de la reprise de leurs contenus protégés, qui devra couvrir, de façon rétroactive, les droits dus à compter de l'entrée en vigueur de la loi, en octobre 2019. Pourquoi c'est un pavé ? « C'est un tournant dans les relations entre Google et les médias français », note mind Media. L'Autorité considère que « Google est susceptible d'avoir abusé de sa position dominante sur le marché des services de recherche généraliste en imposant des conditions de transaction inéquitables aux éditeurs de presse ». « Je salue la décision de l'Autorité. C'est une décision exceptionnelle. Elle est claire et forte et elle nous satisfait pleinement », s'est félicité auprès de La Correspondance de la Presse Marc Feuillée, directeur général du groupe Figaro et président du Syndicat de la presse quotidienne nationale (SPQN). | UN FORMAT À LA LOUPE | | Consommer des contenus en 10 minutes, top chrono. C'est le pari de Quibi (Quick bites), le service de streaming lancé lundi par l'ancien patron de Disney Studios, Jeffrey Katzenberg, aux États-Unis et au Canada. Avec ses séries et films courts, réalisés en formats vertical et horizontal, la plateforme conçoit ses programmes originaux pour une lecture sur smartphone. Comme le note l'AFP, la plateforme doit s'adapter à un tout nouveau contexte : « Le fondateur de Quibi avait imaginé des utilisateurs qui regarderaient les vidéos courtes dans les transports en commun ou lors d'une pause au bureau. Avec les mesures de confinement et de distanciation sociale, la plateforme doit finalement séduire des audiences sédentaires. » Un défi inédit, d'autant plus que la plateforme se retrouve dans un marché déjà saturé par TikTok – le nombre de téléchargements de l'appli musicale a explosé pendant le confinement – Instagram ou YouTube. | LE CONTENU QU'ON AURAIT ADORÉ FAIRE | | Privés de matchs depuis le début du confinement, les journalistes de So Foot commentent Top Chef à la manière d'un match de foot et se donnent à cœur joie pour noter les prestations culinaires des candidats du show phare de M6. « Un Diego en état de grâce, le FC Violet dans le creux de la vague, Gratien au bord du gouffre et Mallory plus grand espoir belge depuis Eden Hazard : c'était un beau spectacle, plein de suspense. Et voici les notes... » On vous laisse savourer... | UNE DERNIÈRE LIANE POUR LA ROUTE | Comment avons-nous pu passer à côté durant tout ce temps ? C'est une histoire rocambolesque. Où la réalité dépasse (complètement) la fiction. Diffusée sur Netflix depuis le 20 mars, la série documentaire Tiger King – Au royaume des fauves – fascine par son étrangeté, ses personnages hauts en couleur complètement défoncés à la meth et l'univers sauvage dans lequel ils évoluent – un zoo de fauves, au fin fond de l'Oklahoma. On y suit le parcours de Joseph Allen Maldonado-Passage, dit Joe Exotic, ancien propriétaire du zoo, grand amateur de tigres (qu'il câline comme des chatons), gay polygame tatoué, chanteur de country et candidat (malheureux) à la présidentielle américaine. Avec sa coupe mulet, ses cheveux peroxydés, son jean moulant en cuir, ses innombrables vestes à franges, le personnage prête d'abord à sourire avant de devenir franchement inquiétant. Les réalisateurs Eric Goode et Rebecca Chaikin suivent sa descente aux enfers, jusqu'à la case prison. Condamné à 22 ans de prison, il est accusé d'avoir commandité le meurtre de sa principale rivale, Carole Baskin, présidente d'une association de défense des grands félins. À qui il voue une haine féroce et obsessionnelle. Entre téléréalité absurde et véritable thriller, cette série documentaire inclassable fascine et présente un fauve, d'un tout nouveau genre. Et tout est vrai, selon les auteurs. |
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