Depuis 2010, plus de 400 articles ont annoncé la mort de Bitcoin dont une centaine en 2017 durant la hausse de 900$ à 15.000$. Pourtant, jamais Bitcoin n’a rassemblé autant de puissance de calcul et n’a jamais été aussi vivant avec plus de 200 millions d'utilisateurs à travers le monde. Alors pourquoi les toutologues [spécialistes de tout et surtout de rien, NLDR] habitués aux plateaux annoncent encore sa mort ou pratiquent de grossiers déshonneurs par association ?
Bitcoin n'est pas juste une monnaie, c’est aussi sa propre unité de compte, son réseau de paiement, sa politique monétaire, une triple comptabilité sans chambre de compensation et sans besoin de la coercition d’un État pour exister. Le comparer à une autre monnaie ou un simple actif n’a donc aucun sens, autant juger une toile de maître les yeux bandés.
Imaginons que le prix de la farine baisse, qui en déduit la mort du pain ? Personne et la comparaison n’est pas si absurde. De nombreuses cryptos sont avant tout des matières premières numériques. Si Bitcoin est un livre comptable, d’autres blockchains comme Ethereum pratiquent une autre forme d’écriture pour façonner des applications d’un nouveau genre faisant évoluer l’usage d’Internet vers le Web3. Ces cryptos sont la farine, l’eau et le sel d’un nouvel Internet, celui de la valeur.
En tant que directeur pédagogique d’Alyra, l’école blockchain, j’ai vu des centaines de projets naître, lever des fonds et ce n’est pas les cas d’usage pertinents qui manquent. Tout métier lié à la confiance, à l’horizontalité, à la traçabilité… peut voir son champ d’action décuplé grâce à ces technologies. Comme toujours, l’adoption passe par une longue phase d’apprentissage offrant à toutes et à tous les clefs de lecture nécessaires à une opinion éclairée.
Et ça ne serait pas du luxe, car le monde s’accélère : les universités américaines incluent Bitcoin dans leur programme, le monde de la finance s’y met avec l’ETF Bitcoin de BlackRock et KPMG a publié un rapport à contre-courant total des poncifs assassins à la mode. Selon une étude de Bitstamp, la population française serait l’une des moins informées en matière de crypto. Bref, il n’a jamais été aussi important d’être technologiquement polyglotte, à une époque où l’IA automatise déjà certains de nos textes, peut-être que demain, la robustesse des blockchains permettra de garantir la confiance mieux que le département juridique des multinationales. Encore faut-il pour cela être à jour.
Daniel Villa Monteiro, directeur pédagogique d'Alyra et co-auteur de la BD Alice au pays des cryptos (Faubourg, 2023)