Dans les prochains jours, l’Union européenne s’apprête à vivre un moment décisif dans ses relations commerciales avec les États-Unis de Donald Trump, qui a fait des droits de douane son principal levier contre Bruxelles. Et l’approche prudente adoptée jusqu’ici par la Commission européenne dans les négociations commerciales avec Washington est sur le point d’être mise à rude l’épreuve. Bien que la Commission européenne ait préparé des droits de douane sectoriels en représailles visant pour plus de 100 milliards d’euros de produits américains, elle n’a jamais vraiment évoqué de manière concrète de leur utilisation. Et à l’approche de la date butoir du 9 juillet, à laquelle Washington a annoncé qu’il imposerait des droits de douane de 50 % sur l’ensemble des produits européens, ces contre-mesures restent absentes du débat public. Pendant que les États-Unis enchaînent les annonces musclées, Bruxelles continue d’adopter une ligne technocratique. Une posture mesurée, mais qui suscite désormais des interrogations sur sa pertinence. Certains dirigeants européens appellent à changer d’approche. Le chancelier allemand Friedrich Merz plaide par exemple pour un accord rapide afin de protéger l’industrie automobile — un secteur important pour l’Allemagne. Le président français Emmanuel Macron pousse quant à lui pour une riposte immédiate : l’imposition d’un droit de douane de 10 % sur toutes les importations américaines si Donald Trump maintient ses « droits universels » de 10 %. Mais pour l’instant, l’exécutif européen laisse les menaces aux États membres. Le commissaire au Commerce, Maroš Šefčovič, s’envole ce mardi 1er juillet pour Washington pour de nouvelles discussions dans le cadre d’une « délégation technique ». Objectif : désamorcer la crise avant l’échéance du 9 juillet. « Personne en Europe ne veut d’une escalade », a déclaré António Costa au Wall Street Journal lundi 30 juin. Cependant, jusqu’à présent, cette stratégie d’apaisement ne semble pas avoir porté ses fruits. En pleines négociations, le président américain a doublé les droits de douane sur l’acier et l’aluminium européens, sans qu’aucune mesure équivalente ne soit prise à Bruxelles. L’UE est également sur la défensive en matière de stratégie politique. Elle a été contrainte de démentir les affirmations de Donald Trump selon lesquelles les législations de l’UE visant à règlementer les géants du numérique seraient à l’ordre du jour des négociations commerciales. Il s'agit notamment des lois sur les services et les marchés numériques (Digital Markets Act/DMA et Digital Services Act/DSA). En outre, la décision du Canada de renoncer à sa propre taxe sur les géants du numérique, face à la pression américaine, constitue un signal d’alarme pour l’Europe. Parallèlement à cela, la Commission est revenue sur les déclarations de sa présidente, Ursula von der Leyen, lors du sommet européen de la semaine dernière, selon lesquelles l’Accord de partenariat transpacifique global et progressif (PTPGP) pourrait représenter une alternative crédible à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), dont le système de règlement des différends reste bloqué en raison de l’opposition des États-Unis. Lundi, la présidente a réitéré son soutien à une réforme de l’OMC. Lors d’une réunion lundi, la Commission a indiqué aux diplomates qu’elle préférait un scénario dans lequel toute imposition de droits de douane serait évitée de part et d’autre. Selon des diplomates européens au fait des discussions interrogés par Euractiv, ce scénario « idéal » serait un « accord-cadre » similaire à celui conclu en mai entre les États-Unis et le Royaume-Uni. Les porte-parole de la Commission Thomas Reigner et Paula Pinho ont indiqué lundi que les négociations progressaient et que le Berlaymont était optimiste quant à la conclusion d'un accord avant le 9 juillet. Les ambassadeurs des États membres recevront un compte-rendu détaillé de l'état des négociations vendredi 4 juillet, au lendemain du retour de Maroš Šefčovič de Washington. D’ici là, l’Europe retient son souffle. |