A la fin, la littérature parle toujours du réel. Souvent, elle choisit sciemment la manière qui lui semble la plus adéquate pour entrer dans ce réel, pour l’affronter, le comprendre, ou bonnement le dire. Cette semaine, dans les entretiens de Qwertz, trois écrivaines ont ainsi opté, de trois manières différentes, pour la première personne. Geneviève Jannelle a vu un couple d’amis amoureux attendre la mort prochaine et annoncée de l’un d’eux. Cherchant comment et quand se séparer. Elle choisit la première personne, dans un roman concis, Prendre son souffle. Pour affronter ? Patrica Delahaie, elle, choisit la première personne pour creuser encore l’affaire Ranucci, du nom de l’antépénultième condamné guillotiné en France, en 1976. Peut-être à la suite d’une erreur judiciaire. L’autrice change les noms, et choisit la fiction, pour entrer dans la peau du criminel présumé, pédophile possiblement passif. Pour comprendre ? Anne Plantagenet, enfin, ne prend pas le chemin de la fiction. Elle choisit une écriture et un travail documentaire pour raconter la Disparition inquiétante d’une femme de 56 ans : Letizia, ouvrière et syndicaliste, soudain projetée sur les grands écrans, même à Cannes, avant la disparition sociale, morale, physique. Cette vraie personne, qu’elle a connue. Et qu’elle a voulu faire exister. Bonnes écoutes et bonnes lectures!
DRAMATIQUE
Eros en érosion
Geneviève Jannelle, "Prendre son souffle", ed. Les éditions Québec Amérique L'amour est-il plus intense quand on le sait condamné ? Atteint d’une maladie dégénérative, Eden vit un amour passionnel avec Anaïs, tant que la vie - et le déni - le leur permet. Avec ce roman bref et intense, Geneviève Jannelle compose une tragédie moderne qui questionne les limites de nos sentiments. Par Catherine Fattebert
Patricia Delahaie, "Un lundi de Pentecôte", ed. Belfond Dans la France des années 1970, pour le moins complaisante à l’égard de la pédophilie, l’affaire Ranucci déchaîne les passions. Condamné à mort pour l’enlèvement et le meurtre d’une fillette de 8 ans, Christian Ranucci était peut-être innocent. En se glissant dans l’esprit tourmenté du jeune homme, Patricia Delahaie livre un récit palpitant explorant la psyché d’un coupable idéal et d’une société malade. Par Philippe Congiusti
Anne Plantagenet, "Disparition inquiétante d'une femme de 56 ans", ed. Seuil Figurante lumineuse dans la Trilogie du travail, trio de films engagés réalisés par Stéphane Brizé, Letizia Storti se lie d’amitié avec Anne Plantagenet. Lorsque l’ouvrière disparaît, la romancière tente de retracer, par l’écriture, la personnalité combative et le destin douloureux de cette prolétaire admirable, broyée par la violence du capitalisme contemporain. Par Francesco Biamonte
Rédigé à la manière d'un film d'action, avec suspense et émotion, le dernier ouvrage d'Edouard Louis raconte comment sa propre mère, soumise une nouvelle fois à la violence d'un homme, parvient à s'enfuir de chez elle. Monique s'évade devient aussi le récit de sa sortie de l'invisibilité. Propos recueillis par Anne Laure Gannac Adaptation web: Melissa Härtel
Géraldine Jeffroy, Imaginer Calder, ed. Arléa, 118 p.
Ce bref récit pourrait s’intituler L’art de la joie , si le titre n’était pas déjà pris. En se rendant à Saché, en Touraine, sur les traces du sculpteur Alexander Calder, Géraldine Jeffroy dessine le portrait d’un artiste au tempérament rabelaisien: souverain en son atelier perché sur une colline, l’inventeur du mobile a vécu plus de 20 ans dans ce coin de pays qu’il a durablement marqué de ses créations fantasques et de son charisme généreux. A travers le témoignage de ses proches, à travers l’évocation des lieux aujourd’hui dédiés aux résidences artistiques, l’autrice livre une biographie tendre et admirative, ode à l’art de vivre et de créer. NJ
ROMAN GRAPHIQUE
Olivier Grenson, Le partage des mondes, ed. Le Lombard, 240 p.
Au milieu des bombardements que subit Londres lors du Blitz, un vieil homme recueille une enfant perdue. À chaque alerte, le duo improbable se réfugie dans le métro où ils vont résister ensemble. Grâce au pouvoir de l'imagination, ils tentent de survivre à ce traumatisme qui n'est pas sans rappeler ce que vivent plusieurs populations aujourd'hui dans le monde. Le coup de crayon d'Olivier Grenson véhicule une forme de grâce lumineuse au coeur d'une réalité sombre et grave. Un ouvrage poétique en faveur de la paix et de l'onirisme. COC
Poesie
Yannis Ritos, Les jeux du ciel et de l'eau, ed. Bruno Doucey, 103 p.
Il y avait chez Ristos, le Hugo grec (par l’aura et l’importance), une discipline d’artisan, de militant: écrire au moins un poème par jour, libre, caché, enfermé au camp de Makronissos, prisonnier à Yaros ou exilé sur un caillou du Dodécanèse. Son œuvre est fleuve, reflet des jours sombres et des trêves heureuses au gré des périodes de répression. Composé durant l’été 1960, ce recueil est un herbier solaire, la vision sensuelle d’un poète en état d’éveil heureux et partageur dont la scansion très musicale est ici magnifiquement rendue, dans ce texte inédit en français, par son traducteur Faber Fabbris. « De partout je bois du bleu, mon fils, mais je n’en suis pas encore ivre. » TS En librairie à partir du 31 mai.
Nouvelles
Adelheid Duvanel, Histoire de vent, ed. Corti, 119 p.
Disparue dans un bois, il y a 28 ans, Adelheid Duvanel écrivait des nouvelles comme on sème des cailloux pour ne pas perdre son chemin. La trace de l’écrivaine bâloise est pour le moins sinueuse entre maladies psychiques et addictions. Quatrième traduction de ses écrits par Catherine Fagnot, fine passeuse de ses textes aux faux airs de contes, Histoires de vent se dévore façon bonbons acidulés et éclaire un peu le mystère de cette trop discrète écrivaine devenue culte : « Je me sens comme un gant vide dans lequel chacun fait entrer de force ses gros doigts. » TS
Généalogique
Non commun
Celle qui demeure, le deuxième roman de l'écrivain genevois Sven Bodenmüller, est le fruit d'un travail d'écriture collectif avec les souvenirs d'anciens membres d'une communauté fondée dans les années 1970 en France. Cinq ans de travail pour un résultat captivant. Propos recueillis par Cecilia Mendoza Adaptation web: Lara Donnet
A l’occasion des 100 ans du manifeste du surréalisme d’André Breton, Quartier Livre se faufile au coeur des expositions rétrospectives proposées par le MUDAC et Photo Elysée, à Lausanne. Pour cette émission entre rêve et réalité, et en public, Daniel Sangsue, spécialiste de pneumatologie littéraire et auteur de Les fantômes, comme les chats choisissent leurs maîtres (ed. La Baconnière), sera l’invité d’Ellen Ichters et Nicolas Julliard. Animation : Ellen Ichters et Nicolas Julliard Quartier Livre, RTS La Première, di 26 mai à 16h
Elles sont écrivaines et amies de longue date. Agnès cherche désespérément lʹâme sœur. Julie enquête sur les non-dits de son histoire familiale. Ensemble, elles vont confronter leurs recherches, en faisant appel à différents spécialistes des arts divinatoires. Conçu à quatre mains, Tout ce que le ciel promet (ed. du Seuil) conte, avec beaucoup dʹhumour et dʹautodérision, cette double quête existentielle, plus profonde et douloureuse quʹelle nʹy paraît. Julie Estève et Agnès Vannouvong sont les invitées de Nicolas Julliard. Carte blanche: Lorraine Van Nijen Quartier Livre, RTS La Première, di 19 mai
En 2022, la comédienne Lolita Chammah accouche à 5 mois et demi de grossesse. Son bébé, extrême prématuré, meurt 12 jours plus tard dans ses bras. Que faire de cette douleur ? Lʹécriture vient alors soutenir lʹinjustice, lʹabsurde, et la sidération. Inconsolable mais vivante, lʹauteure raconte aussi pour toutes les personnes qui traversent le même drame. Ainsi que, " Pour ses enfants, celui qui est là, celui qui nʹest plus là, et celui qui viendra ". Jʹai regardé la nuit tomber aux éditions Stock. Lolita Chammah est lʹinvitée dʹAnne Laure Gannac. Vertigo, RTS La Première, ma 21 mai
Festival du Livre de Jeunesse d’Yverdon-les-Bains Fondé en 2000, le Salon du Livre de Jeunesse a pris de l’ampleur pour devenir, en 2017, le Festival du Livre de Jeunesse d’Yverdon-les-Bains. Plus qu’un événement, il est également une passerelle entre les élèves, les enseignants, les bibliothécaires et les libraires, grâce à des animations d’éveil et des rencontres ludiques. Le Festival est organisé conjointement par Payot Libraire et l’Institut suisse Jeunesse & Médias (ISJM), avec la participation de la Bibliothèque publique et scolaire et du Musée d’Yverdon et région. Festival du livre de jeunesse, Yverdon, ve 24-di 26 mai
La dictée décalée de Thomas Wiesel L’umoriste Thomas Wiesel débarque en prof’ pour taister vôtre conéssance de la lengue franssaise! Essayé sa dictée, un texte de sa kréation, et tanté un sans-faute. Il va faloir réster concentré·e et ne pas céder au rires... Nuit des musées, Lausanne, sa 25 mai
Table ronde «La nouvelle génération du livre» A l’occasion de la sortie du magazine Livre Suisse du printemps 2024, la Librairie l’étage et l’association Livre Suisse proposent une table ronde sur le thème «La nouvelle génération du livre ». Les professions du livre sont-elles attractives aujourd’hui ? Qui sont les jeunes qui font le choix de travailler dans le domaine du livre ? Qui incarne la nouvelle génération du livre ? Une table ronde avec : Ella Balisson, libraire chez l’étage Arthur Billerey, éditeur La Veilleuse Margaud Quartenaux, représentante dans la diffusion Pauline Paccolat, libraire chez Chronopage Daniel Vuataz, programmateur, médiateur, auteur Et Olivier Babel, secrétaire général de l’association Livre Suisse. Animée par Isabelle Falconnier, directrice du Club suisse de la presse La discussion sera suivie d’un apéritif d’anniversaire ! Librairie l'étage, Yverdon, sa 25 mai
Performances littéraires au cimetière de Pully A partir de textes originaux commandés aux autrices et auteurs romands Adrien Gygax, Max Lobe, Douna Loup et Anne-Sophie Subilia, cet événement associe lectures et musique pour une expérience inédite au cimetière de Pully. Cet événement est proposé en collaboration avec la Bibliothèque de Pully et le service des Parcs et promenades de la Ville de Pully. La Muette, Pully, sa 25 mai
Cercle du conte — Chapitre 3 Le Cercle du Conte de La Maison du Récit vise à garder vivante la tradition des conteries, veillées et partages de ces histoires immémoriales que sont les contes, et qui donnent à l’âme humaine la plus essentielle des nourritures. Un groupe de conteuses et conteurs engagés, sensibles et souvent très drôles vont vous raconter leurs contes préférés. La Maison du récit, Lausanne, je 30 mai