Discord s’impose à bas bruit | | « Je crois que Discord est le prochain endroit où les influenceurs et les marques rassembleront leur communauté », soutient sur LinkedIn Grégory Pouy, vigile reconnu – entre autres – des tendances médias et marketing. À en croire l'actualité récente, on ne peut qu'abonder en son sens. (Et rajouter que la plateforme tend à devenir une agora privilégiée pour les journalistes !) Créée en 2015, la plateforme, à l'origine très prisée des gamers, s'est muée au fil des années en véritable réseau social. L'accès est sélectif : il se fait par invitation de lien qui permet de rejoindre chaque espace, appelé serveur. Aujourd'hui, ce Slack amélioré compte plus de 150 millions d'utilisateurs actifs mensuels et plus de 10 millions de serveurs actifs hebdomadaires, selon les données de l'article de Vogue Business, daté du 25 janvier 2022.
Tour d'horizon des différents usages de ce réseau plutôt discret, à la diaspora étendue. Discord, d'abord une plateforme pour geeks fans de cryptos ? Il n'y a pas que Twitter où frémit la communauté crypto-enthousiaste. Si l'on en croit Yoann Lopez, créateur de la newsletter Snowball, Discord est devenue LA plateforme de référence du Web 3.0 : « Tous les gros projets cryptos se passent aujourd'hui sur Discord, un mélange entre Slack et une plateforme audio. Dès qu'un projet NFT se crée, il y a souvent un Discord à côté. N'importe qui peut y entrer, voir ce qui se passe, quels sont les contributeurs du projet », explique-t-il. Cet esprit d'ouverture – inhérent à la philosophie Web 3.0 – n'est pas sans risque. À la fin du mois de décembre, Verge titrait « Le piratage de Discord est la nouvelle menace pour les acheteurs NFT », faisant référence à un hack sur Discord de la part de scammers partis avec un butin de 150 000 dollars en crypto-monnaies. Discord, filon juteux pour les marques ? Pour Vogue, Discord est devenu « la dernière passerelle en date permettant à des marques comme Adidas et Gucci d'entrer dans le métavers ». Adidas a ainsi lancé un serveur Discord au moment où la marque a annoncé un partenariat NFT avec Prada. En une journée, la marque a attiré plus de 30 000 membres. Les discussions sur Discord tournent autour du fonctionnement d'une DAO Adidas, la possibilité de créer une chaîne de fitness ou encore des suggestions pour un défilé de mode dans Decentraland, plateforme de réalité virtuelle. Parmi les autres marques qui disposent de serveurs Discord figurent Nars, The Hundreds, Sephora, Collegium et StockX, qui utilise Discord pour héberger son projet NFT récemment lancé. « S'il existe un Soho House du Web 3.0, il se trouve sur Discord », contextualise Amanda Cassatt, experte marketing qui aide les marques de luxe à entrer dans le métavers. « Tirer parti de Discord, c'est du marketing d'influence dans le Web 3.0. Les marques qui tentent de créer une communauté comprennent l'intérêt de nouer des relations au sein de ces communautés fermées, car ce sont les communautés existantes qui donnent naissance aux nouvelles », poursuit-elle. Discord, havre de paix pour les journalistes et leurs communautés ? « Les gens en ont marre de Twitter : Discord offre une façon plus intimiste de se rencontrer en ligne », nous expliquait au mois de mai 2021, le journaliste tech Ryan Broderick. Avec un collectif de journalistes dirigé par Casey Newton, ils ont tenté « l'expérience médiatique la plus originale de l'année », selon Forbes. C'est-à-dire lancer sur Discord leur propre salle de rédaction virtuelle où les abonnés ont la liberté de discuter avec les journalistes et d'assister en direct à des interviews exclusives. « Je pense que les réseaux sociaux publics sont en perte de vitesse et qu'ils vont devenir plus agressifs et chaotiques, comme Twitter, tandis que les réseaux sociaux privés vont gagner en popularité, à l'image de Discord », prédisait-il. (On parlait de l'exode des journalistes de Twitter, ici, effrayés par la violence du réseau) En France, les usages sont multiples dans le milieu des médias. Benoît Raphaël, créateur de la newsletter Flint, utilise aussi la plateforme depuis un an : « On a 1 000 abonnés en permanence sur Discord, profs, étudiants, cadres, on fait des apéros audio. C'est une communauté de grande qualité », expliquait-il à Médias en Seine (notre compte rendu à trouver ici). Il loue également le fait que Discord possède de « nombreux outils pour prévenir les comportements dangereux ». Si la plateforme peut servir de support pour les collectifs de pigistes, elle peut ainsi rassembler des journalistes guidés par les mêmes marottes. Le Journocord, serveur Discord d'Ecran Mobile tenu par Denis Verloes, rassemble ainsi « une communauté de journalistes tâteurs de solutions numériques innovantes » et qui permet de « constater un foisonnement de partageurs de bonnes pratiques, toujours liées aux médias numériques ». Pour résumer, un « hub de connaissances ». On peut remarquer que ces nouvelles salles de rédaction sont un moyen efficace de lutter contre la baisse des effectifs et l'individualisation croissante du métier... Soit un solide rempart contre l'adversité et la violence de ce milieu. | | | JUNGLE STORIES | Tout savoir sur le Live Event Il s'agit d'un changement majeur dans la gestion des événements sur LinkedIn. Il n'est désormais plus possible de streamer les LinkedIn live sur les pages Events. LinkedIn a lancé en décembre Live Event, un LinkedIn live amélioré qui permet – entre autres – de générer des leads avant, pendant et après un live. Voir le webinaire | | | | UN PAVÉ DANS LA JUNGLE | LinkedIn continue d'enregistrer des « niveaux records » d'engagement, et son activité Sales Solutions atteint 1 milliard de dollars de revenus pour la première fois. Le chiffre d'affaires de LinkedIn a augmenté de 37 %, grâce à une forte demande publicitaire au sein du service « Marketing Solutions business ». Par ailleurs, les sessions LinkedIn ont augmenté de 22 % avec un engagement record. (Source : Rapport Microsoft 2022.) Les événements LinkedIn sont également en hausse, la plateforme voyant désormais plus de 24 000 événements créés chaque semaine ! Pourquoi c'est un pavé ? Le monde de l'emploi est en pleine ébullition. Économie des créateurs sur le devant de la scène, démissions en cascade aux États-Unis (« The Great Resignation »), volonté d'aligner ses valeurs avec son emploi : le travail change de définition et LinkedIn semble un point de départ convoité pour se lancer vers de nouveaux défis. Comme l'explique Microsoft : « Nous vivons un grand remaniement sur le marché du travail. De plus en plus de personnes partout dans le monde repensent comment, où et pourquoi elles travaillent. Dans cette nouvelle économie, LinkedIn est devenu un acteur essentiel pour connecter les créateurs avec leurs communautés, les demandeurs d'emploi avec les employeurs, les apprenants avec leurs futures compétences et les vendeurs avec les acheteurs. » En 2016, lorsque Microsoft a acquis LinkedIn pour 26,2 milliards de dollars, le réseau social professionnel comptait environ 430 millions de membres, ce qui a presque doublé, avec plus de 810 millions de personnes désormais inscrites sur l'application. Et sinon, le Parlement européen a enfin adopté le « Digital Services Act », qui entend réguler les grandes plateformes du numérique, notamment au niveau du ciblage publicitaire. | UN FORMAT À LA LOUPE | | Linktree, vous connaissez ? Il s'agit d'une application en ligne permettant de créer une page de renvoi pour répertorier différents liens - vers un clip, un article, une newsletter... Cette page de renvoi est elle-même accessible via un lien habituellement inséré dans les bios des utilisateurs Instagram et TikTok : les fameux link-in-bio. « Le lien ouvre une page de destination externe remplie d'un peu de tout », explique The Atlantic. Linktree domine aujourd'hui le secteur, avec plus de 20 millions d'utilisateurs. Selon une étude réalisée par la société d'analyse web Parse.ly, les liens Linktree représentent près de la moitié du trafic des link-in-bio sur Instagram. La tendance est apparue à l'origine pour remédier à un problème de taille : que l'on soit Justin Bieber ou Selena Gomez, il n'est possible d'insérer qu'un seul lien dans la précieuse bio de ces applications. Ces pages de renvoi sont donc devenues de nouveaux eldorados à conquérir pour les créateurs de contenus, qui s'amusent à transformer des pages simplistes en affichages spectaculaires et interactifs. Des entreprises comme Red Bull, ou Qantas Airlines préfèrent renvoyer vers une page Linktree plutôt que vers leur site web. La raison de cet engouement ? En plus d'être gratuite et simple à utiliser, l'application est idéale pour héberger des mises à jour, contrairement aux sites web qui sont généralement assez statiques. | LE CONTENU QU'ON AURAIT ADORÉ FAIRE | | TikTok attire les marketeurs grâce à ses chiffres qui frôlent le ciel. En 2022 et pour la première fois, l'application rentre dans le top 20 du classement des marques les plus puissantes du monde présenté par Brand Finance. L'application a connu la plus forte croissance de l'année avec une hausse de 215 % et une valeur estimée à 59 milliards de dollars. Rien d'étonnant alors que les marketeurs s'approprient petit à petit la plateforme. C'est le cas de @estheriumcrypto, l'influenceuse crypto qui donne des conseils d'investissements. Avec ses 156 000 abonnés, elle a su surfer sur la hype des crypto-monnaies, tout en choisissant la plateforme la plus adaptée à son contenu. Celle qui se dit « Crypto enthousiaste depuis 2016 » crée des vidéos didactiques, mais pas barbantes pour autant. La recette magique ? Jouer sur le format court de TikTok, incarner ses contenus en faisant du face-cam, faire un montage cut et poster de manière régulière. Ce succès n'est pas sans rappeler celui de l'influenceuse crypto Caroline Jurado – 90 000 abonnés au compteur – qui, à chacune de ses vidéos sur TikTok, n'oublie pas de faire la promotion de sa newsletter crypto dans les dernières secondes. Un moyen efficace pour attirer le chaland ! | LE CONTENU QU'ON A AIMÉ FAIRE | Les entreprises sont-elles plus menacées par la cybermalveillance depuis la pandémie ? La digitalisation accrue a eu pour conséquence l'explosion des actes de cybermalveillance. NEUFLIZE OBC s'est mobilisé aux côtés de Cybermalveillance.gouv.fr pour sensibiliser tout son écosystème (clients, partenaires, collaborateurs) sur l'importance de connaître les risques et les bons réflexes pour se protéger. Découvrez le premier épisode consacré à la cybersécurité sur le thème « Panorama des cyberattaques et de leurs enjeux pour les entreprises », avec Michael Berdugo, directeur général Expert Line. Une vidéo produite par nos soins. | UNE DERNIÈRE LIANE POUR LA ROUTE | Judith Duportail a demandé à l'application Tinder de récupérer ses données personnelles. Au total, la journaliste récupère 800 pages d'information de conversations... et obtient son « score de désirabilité ». Riche de cette matière inédite, elle en fait un livre paru en 2019. Son adaptation télévisée, réalisée par Jérôme Clément-Wilz, vient d'être diffusée sur France TV. Face caméra, la trentenaire explique les rouages de la machine : « Il s'agit d'un business model construit sur notre désarroi, notre solitude. On se fait berner. On croit qu'on va sur une appli pour rencontrer des gens, mais tout est fait pour qu'on ne rencontre personne ! Qu'on reste comme des rats drogués dans une expérience, une espèce d'addiction, d'expectative, de shoot d'ego. » Son vécu, ses données sont analysées par un algorithmicien, un sociologue, des ingénieures, une informaticienne, une PDG d'une appli de rencontre. Chacun s'interroge : à quel point sommes-nous les jouets de la machine ? Un documentaire captivant à voir ici. |
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