
par Tatiana Serova
Journaliste au service économie
"Le prix de la liberté". C’est ainsi que le secrétaire au Trésor Alexander Hamilton définissait la dette des Etats-Unis, en janvier 1790, à l’occasion du premier rapport sur le crédit public. Plus de deux siècles plus tard, la facture donne le vertige : la dette américaine dépasse les 35 000 milliards de dollars. A ce stade, sans dommages...
L’expansionnisme fiscal promis par Donald Trump soulève des interrogations sur la trajectoire de la dette. Son secrétaire au Trésor, Scott Bessent, se montre résolu à réduire le déficit budgétaire. Mais le Committee for a Responsible Federal Budget (CRFB) calcule, dans son scénario central, que si le programme du nouveau président est entièrement mis en place, il alourdirait l’endettement fédéral de 7 750 milliards de dollars entre 2026 et 2035.
En droite ligne de son précédent mandat, Donald Trump a promis un allègement fiscal sur plusieurs fronts. Et pour financer ses mesures, il mise sur les recettes des droits de douane. Même si les ordres de grandeur sont loin de coïncider : les importations américaines représentent 3 000 milliards de dollars, alors que l’assiette de taxation de revenus s’élève à 20 000 milliards, rappelle Bruno Cavalier, chef économiste à Oddo BHF. Néanmoins, ces tarifs douaniers pourraient surtout servir de moyens de pression pour obtenir des concessions commerciales. Les recettes à en tirer sont donc loin d’être certaines.
Le nouveau président mise aussi sur un rabotage des dépenses publiques grâce à davantage "d’efficacité gouvernementale". Un chantier confié à son allié Elon Musk, qui s’est dit capable de couper 2 000 milliards, soit près d’un tiers du total. Mais à défaut de toucher aux programmes, tels que la sécurité sociale, sa marge de manœuvre s’annonce limitée.
En réalité, l’endettement américain est sur une pente glissante depuis plusieurs années. En juillet dernier, le président de la Réserve Fédérale, Jerome Powell, alertait : "Notre niveau d’endettement n’est pas insoutenable, mais la voie sur laquelle nous sommes engagés l’est".
Insoutenable ? Tout le monde ne se montre pas si alarmiste. "Une crise de la dette de l’Etat fédéral est loin d’être certaine. Son poids est passé de 30 % du PIB au début des années 2000 à près de 100 % aujourd’hui… sans que la pression sur les taux des emprunts d’Etat ne monte", constate Florence Pisani, directrice de la recherche économique à Candriam. Reste à savoir si les marchés financiers demeureront conciliants encore longtemps.