par Muriel Breiman Rédactrice en chef adjointe Economie-Entreprises @murielbreiman Pour résoudre un problème, encore faut-il en dresser correctement le diagnostic. L’exécutif a décidé de s’attaquer aux dépenses liées aux arrêts maladies, en hausse de plus de 50 % depuis 2015 et qui devrait dépasser 17 milliards d’euros cette année. Une démarche saine dans un pays où la dette publique explose. Pour autant, la facture de l’absentéisme en France n’est pas qu’une affaire d’indemnités journalières. La multiplication des arrêts maladie pèse aussi sur la productivité des entreprises. "A l’échelle de la nation, c’est une fuite gigantesque de PIB", souligne Laurent Cappelletti. Avec l’Institut de socio-économie des entreprises et des organisations, ce professeur au Conservatoire national des arts et métiers a évalué cette déperdition à 100 milliards d’euros par an, au bas mot. Soit un manque à gagner colossal en termes de recettes fiscales. Corroboré par des organismes de prévoyance, ce chiffre n’est qu’un ordre de grandeur. En réalité, il est sans doute bien plus élevé. "Une partie de la solution consisterait à documenter qualitativement et économiquement les causes et les conséquences de l'absentéisme au travail", poursuit Laurent Cappelletti, qui impute une partie de la hausse de ces arrêts en cascade à des méthodes de management obsolètes : trop tayloriennes, trop verticales, pas assez personnalisées. Modèle rejeté particulièrement par les jeunes générations, le phénomène est encore plus criant – et ravageur – dans l’atmosphère bureaucratique de la fonction publique. Le nombre de jours d’absence par an et par personne y atteint 14,5 en moyenne, deux jours de plus que dans le secteur privé. Il y a dix ans, l’étiage se situait à 8 jours, chez les uns comme chez les autres. Le management n’explique pas tout. Les arrêts maladie abusifs sont loin d’être marginaux. Et l’exécutif, déterminé à serrer la vis, est dans son bon droit. "Nous sommes dans un système socialisé de financement de l’absentéisme au travail, soutient le professeur. Il est donc légitime, éthique, voire démocratique que le contrôle de ce système soit beaucoup plus rigoureux". Pour restaurer la confiance entre les acteurs et réduire les déficits publics, le levier mérite d’être actionné. |